Comptables agréés vs experts-comptables

Le projet a retenu la dénomination d’Organisation des comptables agréés au lieu d’Ordre, et a prévu une liste moratoire pour ne pas exclure les praticiens hors champ de la loi. Les personnes qui ne remplissent pas les conditions fixées par la loi disposeront d’un délai de grâce de 10 ans pour s’y conformer.

Comptabilité des sociétés

 La controverse qui a entouré le projet de loi organisant le métier de comptable agréé semble laisser place au consensus. En effet, après plusieurs tractations, les parties prenantes du dossier, notamment les comptables agréés, les experts-comptables et les responsables du ministère de l’économie et des finances, ont fini par aplanir les points de discorde qui figuraient dans la première mouture introduite dans le circuit de validation en juin 2010 avant d’être retirée. Il s’agissait essentiellement de l’appellation du nouveau corps des comptables agréés et du sort réservé aux comptables qui ne se retrouveront pas dans les critères arrêtés pour faire partie dudit corps. «Nous n’avons jamais été contre ce texte. On a seulement préconisé qu’il y ait une appellation différente que celle d’Ordre», précise Mohammed H’did, président de l’Ordre des experts-comptables. Selon d’autres experts, avoir deux ordres pour une même profession peut prêter à confusion. De son côté, El Ghali Khadir, président de l’Association des comptables agréés du Maroc (ACAM) précise que la profession a retenu l’appellation d’Organisation, dans un esprit consensuel, en lui conférant des pouvoirs disciplinaires à l’encontre de ses membres en infraction des règles déontologiques observées dans le secteur de la comptabilité. «Les esprits se sont apaisés et tout le monde est conscient qu’il s’agit d’un texte fondamental pour le bien de l’ensemble de la profession», ajoute-t-il.

Hormis le problème de dénomination, le projet de loi introduit au Parlement a prévu dans son article 101 d’établir une liste moratoire recensant l’ensemble des comptables qui ne satisfont pas aux critères définissant le comptable agréé. «A travers cet article, nous cherchons à n’exclure aucun praticien. Ceux qui ne se retrouveront pas dans les dispositions du texte seront listés et disposeront d’une période moratoire de 10 ans pour se conformer aux conditions d’accès à l’organisation des comptables agréés», explique M. Khadir.

L’absence de conditions d’accès et d’autorité disciplinaire ouvrait la voie aux abus

La profession de la comptabilité est composée aujourd’hui de trois catégories de professionnels : les experts-comptables, au nombre de 400 environ, organisés dans un Ordre et disposant du monopole de l’audit et de la certification ; les comptables agréés, qui avoisinent les 700, regroupés dans une association et s’occupant de la tenue de la comptabilité, la supervision comptable et le conseil en concurrence avec les experts-comptables, et enfin, les comptables, les plus nombreux (plus de 2 000), regroupés eux aussi dans des associations, sous la houlette d’une fédération, et pouvant aussi offrir des prestations de tenue de comptabilité. La profession d’expert-comptable est régie par la loi 15/89, celle de comptable agréé par le décret n° 2.92.837 du 3 février 1993, tandis que celle des comptables n’est soumise à aucun texte. Dans la situation actuelle, rien n’interdit à un particulier de s’improviser comptable, d’ouvrir un cabinet et d’offrir des prestations de tenue de comptabilité. «C’est pourquoi nous avons besoin de cette loi. Toute la profession y gagnera. En définissant les conditions d’exercice, il n’y aura plus de cafouillage comme aujourd’hui. Nous avons connu même plusieurs cas où des investisseurs se sont fait arnaquer par leurs comptables à Tanger et Marrakech», confie M. Khadir. Ce besoin d’organisation du métier se pose avec plus d’acuité au regard de la mission dont le comptable est investi. Il s’agit d’une mission très sensible, vu que les comptes fiables constituent une assurance pour les divers partenaires, investisseurs, banques, salariés et autres. Le comptable agréé est, à cet égard, un garant des intérêts des tiers, et ce, par ses qualités professionnelles et morales.

Cela dit, sur le registre de la concurrence, bien que la certification des comptes reste le monopole des experts-comptables, M. Khadir rappelle que cette activité est une denrée rare vu qu’elle est l’apanage des grandes S.A et des Sarl dont le chiffre d’affaires dépasse 50 MDH. «Cela représente moins du quart du marché. A l’opposé, l’essentiel du tissu économique, constitué de PME, est de forme SARL. Ces PME/PMI ont surtout besoin de travaux de supervision comptable, de déclarations et de conseil. Le métier comprend des comptables agréés qui sont sollicités pour leur expertise et leur professionnalisme davantage que les experts-comptables. C’est la loi du marché. Ce qui est sûr, c’est qu’il y a de la place pour tout le monde, vu que le besoin est énorme», explique-t-il.

Source : www.lavieeco.com